L’affaire de Rabière

Est-ce possible de s’imaginer que notre commune si paisible connut, voici trois quarts de siècle, une affaire criminelle d’importance, dont l’apogée eut lieu sur l’échafaud le 26 juillet 1934 ?

Voici l’affaire :
Le 16 octobre 1933, au lendemain de la fête à Maillet, l’annonce d’une tuerie sur la ferme de Rabière semait l’effroi sur Louroux et les environs. Les époux Salvert, âgés tout deux de 69 ans, qui vivaient avec leurs filles sur la métairie tenue par leur gendre M. Phillouzat, avaient été sauvagement agressés pendant la nuit. Louis Salvert, dont on disait « Y’a que le tonnerre pour le tuer » était mort de ses blessures quant à Mme Salvert, elle était entre la vie et la mort.

Enfant, Fernand Lamarque se souvient d’avoir eu peur et d’avoir quitté l’école plus tôt que d’habitude pour rentrer chez lui retrouver les siens. Odette Bernardin se souvient d’une journée bien longue à attendre le retour de son père, maire de Louroux qui avait du se rendre sur les lieux du crime pour effectuer les démarches dues à sa fonction.

Mme Salvert survécut à ses blessures et put dénoncer le meurtrier qu’elle connaissait bien .Il s’agissait de Louis Vénuat, un ancien ouvrier de la ferme. Il fut arrêté sans difficulté dès le lendemain du crime. Il ne donna pas d’explication à son geste, et si la chanson (voir ci-dessous) avance la thèse d’une déception amoureuse, les jurés de la cour d’assises de Moulins conclurent à un crime purement crapuleux et condamnèrent l’assassin à la peine capitale. Louis Vénuat fut le dernier guillotiné en terre bourbonnaise.

A l’époque, la télévision n’existait pas, ce sont donc les journaux qui s’emparèrent de l’affaire et donnèrent forces détails pour faire sensation. Preuve en est l’extrait de journal Le Centre, datant du 1ier décembre 1933 et relatant la reconstitution du crime.

De tous temps les crimes ont suscité la curiosité, ainsi dans les années soixante, Philippe Chabridon, instituteur au Brethon, écrivit la chanson sur le crime de Rabière. Et de nos jours, c’est Pierre Marc Téty qui perpétue la mémoire dans son livre « Les grandes affaires criminelles du Bourbonnais ».

C’était dimanche jour de fête
Dans une ferme loin du bourg
Tout le monde était en toilette
On riait on fêtait l’amour
C’était le jour des accordailles
On avait fait un bon festin
On chantait on faisait ripaille
On ne songeait pas au destin
Mais par un bandit
Le soir à minuit
Tout ce bonheur serait détruit
Après le dîner, la jeunesse
Au bal était allé danser
Les vieux parents pleins de tendresse
Souriants allaient se coucher
Mais voilà qu’on frappe à la porte
La vieille maman va ouvrir
Croyant revoir sous bonne escorte
Sa jeune fille revenir
Ce fut Louis Vénuat
Qui la salua
Et un bon lit lui demanda
Mais comme aucun lit n’était libre
Dans la grange on doit l’envoyer
Il suit le vieillard.
Son cœur vibre
Il sait qu’à l’instant il va tuer
Il commet sans horreur son crime
Puis retournant vers la maison
Sur la veuve de la victime
Il s’acharne là sans raison.
On criera Haro !
Lorsque le bourreau
Le poussera sur l’échafaud
Refrain
Quand on parle du crime affreux
De la vielle métairie
On croirait une folie
Tant les faits en étaient monstrueux
L’assassin des deux pauvres vieux
Fut accueilli sans méfiance
Salissant leur indulgence
Il a voulu les tuer tous les deux.